Vin
16 03 2022

Du bon usage de la biodiversité à Angelus

La raison d'être du vigneron est d’exploiter la terre afin d’obtenir une qualité de raisins telle que le meilleur vin possible sera produit. 

 

Pour cela, il faut un sol, un cépage, un climat et la main experte de l’homme. Les interactions entre tous ces éléments relèvent d’une alchimie subtile. Favoriser un sol vivant et pourvu en matières organiques, maintenir son parfait équilibre sont l’objet d’un savoir précis, technique, et d’une réflexion enrichie par l’observation et l’expérience accumulées au fil du temps : car ce qui peut sembler parfait en théorie ne conviendra pas nécessairement à la complexité végétale et tellurique de telle ou telle parcelle. Depuis déjà plusieurs années, deux experts travaillent au Château Angelus pour oeuvrer à un vignoble durable dans le respect de la biodiversité, meilleure alliée de la vigne. C’est la philosophie du domaine. Le premier, François Lézian, ingénieur agronome de formation, responsable du pôle viticole ; le second, Benjamin Laforêt, biologiste, responsable du pôle vinicole.

 

François Lézian, ingénieur agronome de formation, responsable du pôle viticole et Benjamin Laforêt, biologiste, responsable du pôle vinicole.

Aussitôt les vendanges terminées, ils mènent avec leurs équipes une opération essentielle pour la régénération des sols, le semis de « couverts végétaux » entre les rangs des vignes. « Vendanger, c’est exporter une matière première : le raisin. Il faut ensuite importer de nouveaux éléments naturels dans le sol pour maintenir l’équilibre du vignoble », explique François Lézian. Les 80 hectares de vignes que compte le domaine recevront ainsi plusieurs tonnes de semences, seigle forestier, vesce, pois fourrager, luzerne, trèfle, navette, moutarde, radis chinois et ray-grass (le gazon anglais), selon l’analyse minutieuse des besoins. « Un bon paysan est un paysan fainéant », résume Benjamin Laforêt, sous forme de boutade. Mais derrière le bon mot, il y a une évidence : quand la nature peut faire le travail de l’homme, il ne faut pas s’en priver. Car elle le fait très bien ! L’ensemencement des rangs va permettre d’aérer, de « décompacter » le sol, laissant ainsi l’eau s’infiltrer via des canaux naturels. L’apport hivernal et printanier de matières organiques servira d’engrais et nourrira le vignoble, le rendant plus résistant aux aléas climatiques. « Quand un homme est malnutri, affaibli, le jour où il rencontre une situation de crise, il en souffrira beaucoup plus qu’une personne en forme et bien nourrie. C’est exactement la même chose pour les sols, résume le biologiste. S’ils sont équilibrés, riches en matière organique, un phénomène “tampon” va se créer, permettant leur résistance à la sécheresse ou au contraire à l’excès d’eau. Dit autrement, si le sol est en bonne santé, la plante le sera également. »

Autre bénéfice de la biodiversité : elle est propice à l’implantation d’espèces animales qui régulent naturellement les populations de ravageurs des vignes, et limitent le recours aux produits phytosanitaires. Preuve que tous les parasites ne sont pas nuisibles. « Le problème n’est pas de détruire, mais de vivre avec les espèces commensales », ajoute Benjamin. C’est aussi une des raisons pour lesquelles Château Angelus a mis sur pied un programme de plantation de haies et d’arbres au sein de ses parcelles : formidables niches écologiques, elles apportent au vignoble un relief propice aux chauves-souris, des fleurs mellifères, des abris pour nombre d’oiseaux, ce qui réduit naturellement la pression parasitaire. « Toutes ces actions, auxquelles s’ajoutent des épamprages (*), les ébourgeonnages et dédoublages adaptés, au printemps, ainsi que les effeuillages pendant l’été, concourent à l’obtention de raisins de qualité, ainsi qu’à des équilibres optimaux. L’ensemble de ces mesures prophylactiques permet d’obtenir une vendange de très haute qualité », conclut François Lézian.


(*) L'épamprage consiste à débarrasser un cep de vigne des rameaux afin de favoriser la maturation des branches fructifères porteuses de raisin. Cette opération s'effectue au printemps, du débourrement à la floraison.

Cabernet Franc, décembre crédit photo Deepix